Histoire

Il y a de cela deux décennies ce tenait un village. Pleyrion. Un endroit paisible. Sans histoire. Du moins sans mauvaises histoires. Une zone des montagnes enneigées où il faisait bon vivre. Quelque part où le clan ou plutôt la famille Ysgramor avait décidée de laisser son dévolu. C’est là-bas que le jeune Tolgan y a vu le jour. Dans le froid mordant de l’île Blanche. L’heureuse famille était composée alors de trois générations. Un grand-père, son fils, sa belle-fille et son petit-fils. Nul besoin de dire que l’enfance là-bas était radieuse, chaleureuse et remplie d’amour.

Durant les cinq années qui suivirent le paternel pris soin de son fils comme la prunelle de ses yeux. On n’y voit ici rien d’extraordinaire. Le Père ne voulait en rien faire de son fils un barbare comme tant d’autres, un autre guerrier sanguinaire sans cœur comme il l’avait pu l’être. Non il voulait que sa progéniture soit l’allongement de soi. Le futur maitre forgeron de tout Erfeydes. Pour ça il se devait de lui apprendre les bonnes manières. L’art du fer, l’art du lien, l’art de jouer avec le feu. L’apprentissage se fit très jeune. Comme tous. Comme les rares enfants qui peuvent survivre. Le lien fut surement la chose la plus simple à découvrir. La Terre était comme en résonnance. La chose pouvait être comparée à un jeu. Un divertissement qui plaisait au gamin. D’après les dires de son grand-père, le garçon était doué. Bien plus que son père à son âge. Le gardien avait dû être généreux. Le Talent de forger ne s’invente pas, il s’acquiert.

Mais tout le monde le sait. Le village de Pleyrion à périt une première fois avant de revenir. La perte du hameau, l’énorme bâtisse ne se mesurait pas qu’en terme matériel. Beaucoup ont perdu la vie ce jour-là. Seuls les vieillards, les femmes et enfants ont pu s’enfuir. Un cas qui s’applique à la famille Ysgramor. Le Paternel avait payé de sa vie pour qu’ils puissent survivre. Un prix bien trop cher. Surtout quand on sait que sa femme était en ceinte à ce moment-là. D’une fille. Après la tragédie, le clan trouva refuge dans une zone reculée. Piteuse mais calme. Assez pour laisser la famille continuer à vivre. Le géniteur n’étant plus là, c’est au grand-père qu’est revenue l’éducation du jeune garçon. Un vieillard connu dans le temps pour ses lames à la rare finesse. Une signature qu’avait du mal à acquérir son seul fils. La vie n’était pas aussi aisée que les riches cultivateurs de Korrul mais elle y était paisible.

Ce n’est que dix ans plus tard que la rumeur sur la reconstruction de Pleyrion se fit entendre. Un nouveau hameau encore plus grand et encore plus impressionnant. Une annonce qui faisait échos à la mort d’un être cher. Le grand-père les avait quittés. C’était son heure. Il avait transmis son savoir à celui qui devait leur succéder. Il se retrouva en tant qu’homme dominant avec deux bouches à nourrir. La nouvelle sur ce nouveau village ne pouvait être qu’une aubaine. Ils ont toujours vécu là-bas alors pourquoi ne pas y revenir. Certains sages du village ont certainement eu souvenir du nom de Ysgramor d’autrefois. C’est à bras ouvert que la petite famille rejoignit le cocon de Pleyrion. L’endroit où tout avait commencé et tout devait se finir … surement. Forgeron désormais, le jeune garçon se mit à étudier tous ceux que ses parents lui avaient appris. L’expérience ne lui manquait pas et malgré son jeune âge ont lui voyait déjà certaines qualités.

Aujourd’hui rien n’a réellement changé. Il est toujours le même. Toujours le même garçon à frapper ses lames du soir au matin, à braver la forêt en quête du métal idéal, à nourrir sa famille comme le ferrai un homme sage et endurcit. Bien qu’aujourd’hui une chose est changée. Il voue une loyauté inébranlable au Gardien. Il y a quelques années de cela, alors qu’il chassait dans les plaines. Une bête, dont il connait toujours pas le nom, bien plus grosses que lui, était là, sur lui. Elle l’avait renversée. Sa mâchoire acérée n’était qu’à quelques centimètres de lui retirer la vie. Pourtant elle ne fit rien. Durant cet instant qui n’avait duré que quelques secondes dans les lois du temps. Pour Tolgan, il avait duré des minutes. Comme si quand il avait posé son regard dans celui de la bête, il avait su. Su quoi ? Il ne sait pas. Mais il est certain que ce jour-là ne sont pas les yeux de la bête qu’il a croisés, mais le Gardien lui-même lui a sauvé la vie. Redevable depuis, il ne peut qu’espérer un jour il pourra l’éponger, arme à la main.